Mot-clé : Esquisses de Paris

Le flâneur, par Anaïs Bazin.

« Je ne sais quel est l’ignorant, le flatteur, l’homme de l’ancien régime, la tête poudrée, le rétrograde, qui, voulant s’exprimer fortement son droit de propriété sur une chose qu’on lui disputait, s’est imaginé le premier de dire: « Ceci est à moi comme Paris est au roi. » Et pourtant la langue des proverbes, où l’on assure que se trouvent la vérité triviale et la raison populaire, a recueilli soigneusement ce beau dicton rimé. Il y a, comme cela, une foule d’hérésies dans les formules traditionnelles qui servent à la morale des coins de rues ; et c’est tout au plus si, depuis les journées de juillet, on a cessé d’appeler la voie publique, « le pavé du roi ». Du moins, la Chambre des députés n’a-t-elle pas consacré une seule séance à délibérer sur cette expression, bien autrement offensante pour les instruments de la victoire que ne pouvait l’être pour les vainqueurs la qualification de sujets. Et voilà comme on perd tout le fruit des révolutions! »

Anaïs Bazin

Le choléra-morbus, par Anaïs Bazin.

« On nous l’avait cependant annoncé bien longtemps à l’avance ; on nous avait fait suivre sur la carte sa marche rapide et menaçante. Le fléau voyageur n’était plus séparé de nous que par cette mer étroite qui nous ramène et nous remporte, avec la mobilité de ses flots, nos rois rétablis ou déchus. Et pourtant, ce voisinage nous inquiétait moins que ne l’avaient d’abord fait les récits venus des pays lointains, doublement terribles par la distance et par la nouveauté. Tout notre effroi s’était usé sur les premières descriptions de ses ravages, sur les premiers dénombrements de ses victimes. »

Anaïs Bazin

La bourse, par Anaïs Bazin.

« Tout ce que nous avons su faire de grand et de durable pour conserver le souvenir de notre progrès social, ç’a été d’élever un hôtel au budget et un temple à l’agiotage. –J’oubliais que l’on construit maintenant des prisons. »

Anaïs Bazin

L’hôtel des finances, par Anaïs Bazin.

« Puisque le budget passe, vous êtes sans doute curieux de savoir où il va. »

Anaïs Bazin

L’émeute, par Anaïs Bazin.

« Nous sommes au premier jour ; car l’émeute en a régulièrement trois : c’est un souvenir renaissant de la révolution qui l’a déchaînée. »

Anaïs Bazin

Le Bourgeois de Paris, par Anaïs Bazin.

« Son embarras est grand lorsqu’un beau matin, son journal se prononce contre le gouvernement ; son journal qu’il estime, qui le compte parmi ses plus anciens abonnés, à qui il adresse le montant de sa souscription patriotique, dont le porteur le connaît et le salue par son nom. En voilà pour toute une journée d’incertitude et de malaise. »

Anaïs Bazin

L’époque sans nom, esquisses de Paris, par Anaïs Bazin.

« Dans la prévoyance de cet accident auquel sont soumises toutes les œuvres de l’esprit, depuis les théories jusqu’aux panégyriques, ce qu’il m’importe de constater dans cette préface, c’est que les pages suivantes ont été écrites au fur et à mesure du caprice et de l’observation, durant le cours de cette époque anonyme qui a suivi la révolution de 1830. »

Anaïs Bazin

Un caractère à part (sur Anaïs Bazin), par Olivier Favier.

« M. Bazin était de ceux qui prennent tout d’abord dans leur esprit la mesure des autres, et qui peut-être souffrent un peu de ne pouvoir donner à l’instant la leur : il en résulte que, plus tard, trop tard, quand on leur accorde ce qui leur est dû, ils n’en savent pas gré, et ne répondent au succès qu’avec un demi-sourire ; l’habitude de l’ironie est contractée. »

Sainte-Beuve, Les causeries du lundi.