Pour le meilleur et pour le pire: le laboratoire italien, question à Angelo Mastrandrea.

 

On n’en est pas toujours conscient en Europe, mais l’Italie forme depuis la Renaissance un laboratoire qui permet souvent de comprendre, à des niveaux divers, ce qui se produira dans d’autres pays quelques années plus tard. Au début du vingtième siècle, ce fut le pays de naissance du futurisme, première avant-garde organisée autour d’un manifeste à avoir mis sur le même plan l’art et la politique. Dans l’immédiat après-guerre, le fascisme offre hélas un modèle extrêmement suivi, non seulement en Europe mais en Amérique du Sud jusqu’aux années 1980. La guerre d’Éthiopie de 1935-36 peut à bon droit être considérée comme la première répétition générale de la guerre totale qui éclatera en Europe quelques années plus tard.

Tout près de nous, le phénomène Beppe Grillo, peu analysé en dehors des frontières, a été vu – entre autres par Giuliano Santoro, dans son livre Un Grillo qualunque – comme une sorte de continuation 2.0 de la télécratie berlusconienne. Très probablement, des populismes du même ordre vont naître ailleurs en Europe et bien peu les auront vus venir.

Même si la situation est désormais plus que préoccupante, comme du reste partout en Europe, et même beaucoup plus dans certains cas, l’Italie n’est pas, fort heureusement, que le laboratoire du pire. En lisant les reportages d’Angelo Mastrandra, directeur-adjoint du journal Il Manifesto -dont l’un sur la nouvelle municipalité de Naples paraîtra dans Le Monde diplomatique en février, tant en français qu’en italien- il m’a semblé utile d’évoquer avec lui quelques unes des alternatives politiques courageuses, qui toutes s’efforcent de redonner sens au mot “démocratie”. Sur elles, même en Italie, il règne un lourd silence.

Première page des Confessions d’un italien d’Ippolito Nievo, mort à 30 ans dans un naufrage alors qu’il venait d’être nommé colonel des « Chemises rouges » de Giuseppe Garibaldi. Dans ce chef d’œuvre publié en 1867, l’auteur évoque les luttes de l’Italie pour la liberté et l’indépendance. C’est avec la San Felice d’Alexandre Dumas, l’une des évocations les plus célèbres de la République Parthénopéenne de 1799.

Contre-Réforme: la réaction pour héritage.

L’Italie n’est malheureusement pas un pays qui a pour habitude de faire ses comptes avec l’Histoire. C’est ce qui s’est produit avec le fascisme, avec le colonialisme, c’est ce qui se produit aujourd’hui avec les années 1970 et la lutte armée. Cela vaudrait la peine de se demander pourquoi. Je crois que la raison la plus profonde tient dans ce “côté obscur” du caractère national qui n’a jamais changé, au fond, dans les cinq derniers siècles et qui permet aux Italiens, chaque fois que quelqu’un -une force politique, un personnage charismatique- parvient à le remettre en évidence, de devenir les pires réactionnaires d’Europe. N’oublions pas que le terme réactionnaire vient de la “réaction” à la Révolution napolitaine de 1799, quand les sanfédistes menés par le cardinal Ruffo, avec le soutien du peuple, massacrèrent les révolutionnaires jacobins. Ce fut une révolution manquée, brisée par les réactionnaires, justement. Éclairée de la sorte, des phénomènes comme le fascisme, le craxisme ou le berlusconisme représentent seulement la partie émergée de quelque chose de très profond, et qui a beaucoup à voir avec la Contre-Réforme catholique – l’écrivain Ermanno Rea a écrit un beau livre sur cette question, La Fabrique de l’obéissance. Bref, la thèse – sans nul doute subjective – est que l’échec de la Réforme et le retour à l’ordre ont formé le caractère des Italiens dans un sens réactionnaire. Voilà pourquoi l’Italie est Le pays des révolutions ratées et du fascisme. En outre, avec l’institution du pardon le Vatican a compromis la naissance du citoyen responsable. En somme, s’il suffit de quelques Notre Père pour absoudre les péchés les plus graves, que peuvent bien être la corruption ou le meurtre? N’oublions pas que la mafia est profondément catholique.

Bettino Craxi fut président du conseil italien de 1983 à 1987. Socialiste, il fut un pionnier du tournant social-libéral en Europe. Ami de Silvio Berlusconi, dont il prépara la fulgurante ascension en autorisant l’existence de télévisions privées, il devint la cible la plus spectaculaire de l’opération “Mains propres” en 1992. Condamné à 27 ans et demi de prison dont 10 incompressibles, il trouva refuge en Tunisie où il mourut en 2000, à l’âge de 66 ans. Sa chute entraîna l’effondrement du PSI, condamné désormais à une existence marginale. Il est ici à la première de Nabucco à la Scala en 1986 en compagnie de sa femme et de Silvio Berlusconi. Le bis du « va pensiero » accordé par le chef d’orchestre Riccardo Muti n’aura pas la portée symbolique de celui effectué à Rome 15 ans plus tard, dont les images feront le tour du monde.

Ni public ni privé: les alternatives de l’autogestion.

Si c’est là un aspect du caractère italien, il n’en a pas moins existé de la Renaissance à nos jours une autre Italie, minoritaire probablement, cosmopolite, éveillée culturellement, révolutionnaire oserais-je dire. Cela aussi est un aspect qui apparaît à certaines époques de l’Histoire plus que d’autres et laisse émerger la raison pour laquelle l’Italie ne parvient pas à avoir de mémoire commune: parce que c’est un pays divisé, non seulement géographiquement -le sud historiquement colonisé et donc amené à développer des formes d’anti-État, le nord riche et industrialisé, le centre qui partant de l’expérience des Communes a développé une forte politique territoriale – mais aussi socialement et anthropologiquement. C’est peut-être une thèse audacieuse, mais selon moi elle explique, en partie du moins, la guerre civile entre les « jeunes de Salò » et les partisans, la mafia et l’anti-mafia, et pourquoi l’Italie réussit à être en même temps laboratoire du pire -n’oublions pas que c’est ici qu’est entré dans un gouvernement le premier parti populiste, d’extrême-droite et sécessionniste d’Europe, la Ligue du nord, anticipant le reste du continent – mais aussi de formes avancées de démocratie. Prenons par exemple la question des « biens communs », autrement dit la possibilité d’avoir une gestion collective -ni publique ni privée- de quelques ressources: culturelles, naturelles, etc. Dans un Pays excessivement étatique, cela n’aurait pas été possible, de même dans un pays ultralibéral. Ici en revanche il arrive que des formes d’autogestion naissent spontanément, pensons à tous les théâtres occupés à cause des coupes budgétaires du gouvernement dans le domaine de la culture et menés par des artistes et des travailleurs.

L’opéraïsme est un courant marxiste italien « ouvriériste » apparu en 1961 autour de la revue Quaderni Rossi. Il eut pour principaux théoriciens Mario Tronti et Toni Negri. En 1969, le courant opéraïste se divise entre Potere Operaio et Lotta Continua. À partir de 1972, les opéraïstes s’engagent dans Autonomie ouvrière (Autonomia Operaia). En France, les thèses opéraïstes ont influencé Yann Moulier-Boutang et le groupe Camarades. Photo: Tano d’Amico, Milan, 1976.

Ici aussi, il faut réfléchir selon moi sur les racines historiques de tout cela: la culture, le sens du public et du collectif dans un Pays dominé par l’individualisme ont toujours été l’apanage de cette autre Italie, qui chemin faisant s’est identifiée avec les républicains au cours du Risorgimento, les partisans durant la Résistance, les communistes et les socialistes dans l’après-guerre. N’oublions pas que l’Italie a eu le fascisme et, comme contrepoids de son éternelle guerre civile, le Parti communiste le plus fort d’Occident, en plus d’un Parti socialiste et d’une gauche extraparlementaire née après 1968. On ne peut expliquer les Brigades Rouges si on ne tient pas compte de ce contexte: les brigadistes étaient convaincus non seulement qu’on pouvait mener à bien la « révolution manquée » de 1945 – quand le Pci avec Togliatti avait signé l’amnistie pour les fascistes et, en se mettant d’accord avec les démocrates-chrétiens, avait choisi de maintenir l’Italie au-delà du «rideau de fer» – mais aussi qu’il existerait des forces pour conduire – comme avant-garde léniniste – le processus révolutionnaire. Mais, comme cela s’est produit avec le fascisme, une fois encore l’Italie – quand l’époque de la lutte armée s’est achevée – n’a pas su faire ses comptes avec tout cela et a préféré utiliser le spectre du communisme et de la violence politique pour détruire les expériences les plus intéressantes issues de cette culture. Il est curieux de remarquer que s’est créé le stéréotype des « Italiens braves gens » – l’idée d’une supériorité morale et d’une naturelle bonté d’âme, l’une et l’autre inexistantes, pour justifier le fascisme – largement approuvé par les masses- voir pour ne pas l’oublier, et le colonialisme, qui a été pratiquement effacé des livres d’histoire. Alors même qu’un pareil argument n’est pas utilisé vis-à-vis de la gauche extraparlementaire, « les méchants » par définition encore aujourd’hui -il suffit de penser à ce qu’il s’est produit au G8 de Gênes en 2001, énième épisode de l’éternelle guerre civile italienne. Le paradoxe est qu’aujourd’hui les philosophes, pourtant très différents entre eux, de la dite Italian theory sont étudiés dans les universités américaines, il y a une Gramsci renaissance dans le monde entier, alors qu’ici en Italie ils sont oubliés, la gauche héritière du Pci elle-même – qui a peur de ses racines “communistes” – les a effacés de son panthéon. Le journal que je dirige, Il Manifesto, est né de la rencontre entre la culture non stalinienne du PCI, l’opéraïsme des années 1960 –qui naît en Italie des élaborations d’intellectuels comme Mario Tronti- et les mouvements de 1968 et des années 1970. Même si après la chute du Mur -et avec l’hégémonie culturelle berlusconienne- ce morceau d’Italie semble avoir disparu, en réalité il réapparaît de temps en temps. Quand c’est le cas, on en voit de bien belles.

Une image du cinquantième anniversaire de l’Unité en 1911. Des quatre pères de la patrie, l’un est le futur roi d’Italie, Victor-Emmanuel II, un autre son premier ministre, le comte de Cavour, qui meurt l’année-même de la constitution du Royaume. Les deux derniers sont républicains. Giuseppe Garibaldi renonce cependant à ses idées pour assurer l’Unité du pays. Quant à Giuseppe Mazzini, il meurt sous un nom d’emprunt anglais à Pise, en 1872, après avoir condamné sévèrement la Commune de Paris. Cette dernière prise de position fera beaucoup pour la popularité de son adversaire Bakounine dans les réseaux italiens de l’Internationale. Elle dit beaucoup des limites de la pensée politique du Risorgimento.

À l’épreuve des concepts et des lieux: une praxis italienne.

N’oublions pas qu’en Italie – justement par la présence d’une gauche extérieure à un très fort Parti communiste- sont nées des expériences très intéressantes, des conseils d’usine des années 1970 jusqu’aux centri sociali des années 1990 et aux occupations récentes de théâtres et de structures publiques abandonnées par l’État, qui doivent beaucoup aux théorisations du « commun » de Michael Hardt et Toni Negri. Qu’est-ce qui unit toutes ces expériences? Un lien fort avec la gauche marxiste hérétique et libertaire et les années 1970 – Toni Negri était le leader de Potere Operaio et a passé quelques années en prison. Bien sûr il ne s’agit pas seulement de Negri, si nous gardons à l’esprit qu’en Italie, le concept de «biens communs» est l’objet d’une discussion non seulement parmi les philosophes mais aussi chez de nombreux juristes. Ce n’est pas un hasard si les occupants du Teatro Valle à Rome – un théâtre historique en centre-ville, à 50 mètres de Piazza Navona, qui aurait dû fermer à cause des coupes budgétaires dans la culture- l’ont d’abord autogéré pendant plus d’un an, avant d’élaborer –avec l’aide de quelques juristes– des Statuts et de proposer une Fondation pour en poursuivre la gestion. Le principe c’est que les travailleurs puissent se réapproprier des moyens de production, dans le cas où l’État ne veut pas -ou ne parvient pas- à le faire. Cela se produit en particulier sur le plan culturel et dans l’université -puisque le gouvernement Berlusconi a coupé tout ce qui concernait le théâtre et l’instruction publique, et Monti, qui a porté au gouvernement les professeurs de la plus grande université privée italienne, la Bocconi, n’a rien fait pour revenir en arrière: de là les occupations du Teatro Valle à Rome, mais aussi de l’ex asilo Filangieri à Naples –que la “municipalité rouge” du maire De Magistris a confié à ceux qui l’occupent– du Teatro Garibaldi à Palerme, du Macao à Milan, et j’y ajoute même la protestation, plus traditionnelle, des travailleurs du Teatro Petruzzelli de Bari. Dans le domaine de l’éducation, on ne compte plus les facultés occupées, à cause de la suppression des résidences universitaires et de l’augmentation des loyers. Un autre front est celui du logement: on assiste en Italie au phénomène paradoxal qu’on continue de construire parce que les grands entrepreneurs du secteur touchent l’argent des banques, mais les maisons ne se vendent pas et les prix ne baissent pas. À Rome par exemple, il y a aujourd’hui 300 mille appartements vides, 19 nouveaux quartiers nés ces dernières années où n’habite personne, et 10 mille squatters. Pour ne rien dire des bidonvilles où vivent les immigrés et les roms.

« Comme l’air, comme l’eau, reprenons le (théâtre) Valle. » Cette expérience alternative, parmi les plus spectaculaires de ces dernières années, a fait relativement peu de bruit en France, où existe une tradition de financement (et de contrôle) de la culture ne laissant guère d’imagination pour ce genre d’initiatives.

Les centri sociali – ceux qui ont résisté aux évacuations – sont encore actifs eux aussi, tant sur le plan culturel que sur celui de l’activité politique. Leur particularité -depuis le début des années 1990- a été de réunir la “vieille garde” des militants qui venaient des années 1970 -beaucoup d’entre eux étant des rescapés de la prison et de la drogue- et les nouvelles générations de militants politiques, d’artistes, de hackers, de médiactivistes. Il en est né presque immédiatement un mélange intéressant d’activisme politique radical -qui mêle l’activité “de base” au niveau d’un quartier avec les batailles sur des thèmes globaux- et l’avant-garde culturelle – dans les domaines de la musique, de la vidéo, du théâtre, du web. Évidemment, puisqu’on parle d’un phénomène très vaste – rien qu’à Rome on compte au moins une cinquantaine de Centri sociali– il est aussi très varié. Il faut surtout en souligner la pratique politique: aucune délégation, mais un engagement direct et continu, avec une forte capacité d’organisation, bien que « liquide » et en réseau. Pourtant la nouveauté la plus intéressante des dernières années est indubitablement représentée par des expériences comme celle du Teatro Valle. Malheureusement, la première réaction du monde de la politique a été la criminalisation et le parallèle -totalement instrumentalisé- avec les années 1970. C’est ce qu’il s’est produit aussi avec le G8 de Gênes en 2001, et par chance on est parvenus à démontrer les responsabilités du gouvernement dans la répression. Mais c’est une histoire quotidienne, moins visible parce qu’elle n’est pas sous les yeux des médias. Cette criminalisation évidemment conditionne l’opinion publique et sert au maintien d’un climat de « guerre froide ». En somme, dès que naît une idée de vrai changement, on fait tout pour l’enterrer. Pour revenir au début de mon propos, la raison en est que l’Italie, n’ayant pas fait ses comptes avec son Histoire, continue à reproduire la vieille lutte sans issue entre les réactionnaires de la Contre-Réforme et les paladins de la Réforme manquée, les combattants du Risorgimento, les antifascistes, les communistes.

Traduit et présenté par Olivier Favier.

Antonio Gramsci est l'un des membres fondateurs du Parti Communiste italien, qu'il dirige un temps, avant d'être incarcéré par le régime fasciste de 1926 à 1937. C'est durant cette période qu'il rédige ses Carnets de prison et élabore la théorie de "l'hégémonie culturelle", selon laquelle le prolétariat est amenée à défendre les intérêts de la bourgeoisie. À la force de la société politique, s'ajoute le consentement de la société civile. Pour la combattre, il convient de former des intellectuels issus de la classe ouvrière, appelés "intellectuels organiques". C'est à Antonio Gramsci qu'on doit aussi cette phrase souvent reprise: « Je suis pessimiste avec l'intelligence, mais optimiste par la volonté » (lettre à son frère Carlo du 19 décembre 1929). Photo: Antonio Gramsci. Série: chez Carlo Bordini, Rome, 2010, par Olivier Favier. Tous droits réservés.

Antonio Gramsci est l’un des membres fondateurs du Parti Communiste italien, qu’il dirige un temps, avant d’être incarcéré par le régime fasciste de 1926 à 1937. C’est durant cette période qu’il rédige ses Carnets de prison et élabore la théorie de « l’hégémonie culturelle », selon laquelle le prolétariat est amenée à défendre les intérêts de la bourgeoisie. À la force de la société politique, s’ajoute le consentement de la société civile. Pour la combattre, il convient de former des intellectuels issus de la classe ouvrière, appelés « intellectuels organiques ». C’est à Antonio Gramsci qu’on doit aussi cette phrase souvent reprise: « Je suis pessimiste avec l’intelligence, mais optimiste par la volonté » (lettre à son frère Carlo du 19 décembre 1929). 

L’auteur:

Né en 1971, Angelo Mastrandrea est journaliste et écrivain. Il est originaire de la province de Salerne, au sud de Naples. Directeur-adjoint du quotidien Il Manifesto, où il travaille depuis 1999, il en a été envoyé spécial et a coordonné pour lui des suites de récits: Les refuges de la gauche (des écrivains racontent les «lieux» de la gauche italienne), Made in Italy (des écrivains immigrés racontent l’Italie), Italia underground (récits de l’Italie “alternative” à l’époque de Berlusconi). Ce dernier projet a donné lieu à un livre collectif (Teti editore, 2010). Il collabore aussi à Rassegna Sindacale et Reportage.

Il est l’auteur de Il Trombettiere di Custer e altri migranti (Ediesse editore, 2010), neuf récits d’émigration italienne. Il a publié le récit «Il fotografo di strada è un latin lover», inspiré d’un fait divers, dans le livre de Federico Cartelli, L’occhio svelto, lo scatto facile, Il Grifo editore, 2012. L’histoire est celle d’une dame Autrichienne retournant en Italie après quarante et un ans. Elle a mis une petite annonce dans un journal pour retrouver le père de sa fille, un photographe de rue avec lequel elle a passée une nuit d’amour.

Angelo Mastrandrea prépare un autre livre, un film et un documentaire.

L’Italie et la France ont géré de façon radicalement opposée le temps postcolonial. Les dernières années du berlusconisme ont été marquées par une reprise des relations avec la Libye, où les réparations versées au colonel Khadafi servaient de paravent à des contrats de vente massive d’armement et à un partenariat étroit dans l’approvisionnement des hydrocarbures. Pour autant, l’Italie a tardé à entrer dans la coalition en 2011, comme elle s’était retirée bien vite de l’agressive opération Restore Hope en Somalie en 1993. Des rapports informels ont continué pourtant d’exister permettant notamment le délestage de déchets toxiques aux larges des mêmes côtes somaliennes. Ces actes criminels coûtèrent la vie à la trop curieuse journaliste Ilaria Alpi. Rien de comparable cependant aux liens étroits entretenus entre la France et ses anciennes colonies. De la « Françafrique » ou de l’abandon total, au vu des résultats respectifs, il semble qu’aucune des deux conduites n’aient eu raison des blessures de l’Histoire. Pour l’Italie d’Il Manifesto, l’intervention française au Mali relève du néocolonialisme.

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