Rubrique : Collection

Les feuillets d’Ikonnikov, par Vassili Grossman.

 
« L’amour aveugle et muet est le sens de l’homme.
L’histoire des hommes n’est pas le combat du bien cherchant à vaincre le mal. L’histoire de l’homme c’est le combat du mal cherchant à écraser la minuscule graine d’humanité. Mais si maintenant l’humain n’a pas été tué en l’homme, alors jamais le mal ne vaincra. »

Vassili Grossman

Vénétie barbare de mousses et de brumes, par Goffredo Parise.

 
« Si la Méditerranée recèle des trésors cachés d’art et de culture comme les bronzes de Riace (qui semblent d’improbables créatures vivantes), dans cette terre de Vénétie vivaient pourtant avec leurs elfes et leurs kobolds les cultures nordiques et barbares, non plus méditerranéennes mais forestières, champignonneuses et moussues, gelées et embrumées, l’imagination d’Andersen et des frères Grimm, les steppes de Russie et ses synagogues. »

Goffredo Parise

Le long voyage, par Leonardo Sciascia.

 
« Moi je vous embarque la nuit, avait dit l’homme: une sorte de commis-voyageur pour le bagou, mais au visage sérieux et honnête- et de nuit je vous débarque: sur la plage du Nugiorsi, je vous débarque, à deux pas de Nuovaiorche. »

Leonardo Sciascia

Révolution, par Sławomir Mrożek.

 
« Dans ma chambre le lit se trouvait là, l’armoire ici, entre les deux il y avait la table. Jusqu’au jour où j’en ai eu assez. Je déplaçai le lit ici, et l’armoire là. »

Sławomir Mrożek

Le roi des poupées (extrait), par Edmondo De Amicis.

 
« Et sur les tables, les sièges, les rebords des fenêtres sont jetées, dans toutes les attitudes, de grandes poupées nues, la chevelure tragiquement défaite, les yeux mobiles hagards, les bouches qui parlent grandes ouvertes, les unes aveugles, les autres boiteuses, d’autres mutilées, des têtes séparées de leurs bustes, des troncs tendant leurs bras, des bras et des jambes éparpillées: spectacle horrible qui me rappela l’antre fantastique de Jacques l’Éventreur vu dans une baraque de la place Victor-Emmanuel lors du dernier carnaval. »

Edmondo De Amicis

La trentième année (extrait), par Ingeborg Bachmann.

« Un homme va sur ses trente ans, on n’en continue pas moins à le trouver jeune. Mais, sans arriver pourtant à découvrir en lui le changement, lui-même n’en est plus très sûr ; à croire qu’il n’a plus le droit de se dire jeune. Et un matin, un jour qu’il oubliera, il s’éveille, gisant soudain, incapable de se lever, frappé d’opaques rayons de lumière, sans armes et sans courage pour cette journée neuve. S’il ferme les yeux pour se protéger, il retombe et s’évanouit dans tous les instants vécus. »

Ingeborg Bachmann

Un pays invisible (extrait), par Stephan Wackwitz.

« Il paraît que dans les années soixante, pendant plusieurs mois, Ernst Jünger se levait tous les matins, s’habillait correctement et restait prostré dans un fauteuil jusqu’à l’heure du coucher. C’était sans doute la dépression muette et abyssale du vétéran de la Grande Guerre que j’avais sentie enfant en présence de mon grand-père, bien qu’à l’époque je n’eusse pas su dire pourquoi il était si triste, si froid et si insensible, si angoissant. »

Stephan Wackwitz

Une rose ouverte à vos pieds, par Rosa Luxemburg.

« Faites attention à cet air plein de la respiration passionnée des dernières fleurs de tilleul, à l’éclat et la splendeur de cette journée, parce que ce jour ne reviendra jamais, jamais! Il vous est donné comme une rose ouverte à vos pieds, qui attend que vous la preniez, et la pressiez contre vos lèvres. »

Rosa Luxemburg

Le Mort (extrait), par James Joyce.

« Son âme s’évanouissait peu à peu comme il entendait la neige s’épandre faiblement sur tous l’univers comme à la venue de la dernière heure sur tous les vivants et les morts. »

James Joyce

Lettre à Henri Parisot, par Leonora Carrington.

« si ma vie vaut quelque chose je suis le resultat du temps »

Leonora Carrington