Corrida et fascisme, par George Orwell.

 

Barbastro, bien que très éloignée du front, avait l’air morne et saccagée. Des groupes de miliciens, en uniformes usés jusqu’à la corde, arpentaient les rues, tâchant de se réchauffer. Sur un mur en ruine je vis une affiche datant de l’année précédente, annonçant la date de la mise à mort dans l’arène de « six beaux taureaux ». Quelle impression désolante elle faisait avec ses couleurs fanées! Où étaient à présent les beaux taureaux et les beaux toréadors? Même à Barcelone, il y avait bien rarement à l’heure actuelle une course de taureaux; je ne sais pour quelle raison tous les meilleurs matadors étaient fascistes.

Hommage à la Catalogne, 1938.

 

Chambre. Photo: Olivier Favier. Tous droits réservés.

 

Barbastro, though a long way from the front line, looked bleak and chipped. Swarms of militiamen in shabby uniforms wandered up and down the streets, trying to keep warm. On a ruinous wall I came upon a poster dating from the previous year and announcing that ‘six handsome bulls’ would be killed in the arena on such and such a date. How forlorn its faded colours looked! Where were the handsome bulls and the handsome bull-fighters now? It appeared that even in Barcelona there were hardly any bullfights nowadays; for some reason all the best matadors were Fascists.

George Orwell, Hommage to Catalunya, (1938). Texte intégral en libre accès.

 

Affiche pour une corrida à Madrid en 1940.

 

Pour aller plus loin:

  • Une mise au point nécessaire et suffisante dans Rue 89 sur un sujet dont on devrait simplement s’étonner qu’il prête encore à débat.
  • Des documents relatifs à l’inscription ubuesque de la Corrida au « patrimoine culturel de la Phrance », sur le site de Shigenobu Gonzalvez (1), (2) et (3).
  • Les taureaux s’ennuient le dimanche, Jacques Brel en concert en 1964. Les sous-titres néerlandais sont pour le moins fantaisistes.
  • Une pétition pour que du « patrimoine culturel de la Phrance », on ne’ajoute pas à celui de l’Unesco.

 

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